Théâtrorama

Angelin Preljocaj a transporté le public de Montpellier Danse dans un voyage au bout de la nuit des 24 lieder de Schubert. Vision poétique de Winterreise où danse et musique se répondent en correspondance pour offrir une résonance émotionnelle intense aux spectateurs, sous le charme d’un univers onirique fidèle à la partition romantique du compositeur. 

Le ballet, créé pour les artistes de la Scala de Milan, donne une unité de ton entre les douze danseurs en scène et la musique, interprétée au piano par James Vaughan et accompagné par le baryton Thomas Tatzl. La mélancolie de l’œuvre, qui raconte la lente agonie métaphysique d’un homme en proie à un amour non partagé, s’incarne dans une scénographie tout en nuance de noir se dessinant en paysage de désolation, comme après une éruption volcanique où l’explosion des sentiments laisse place au chaos. 

Romantisme noir

L’ouverture du ballet laisse apparaître une espèce de no man’s land où l’hiver domine avec des corps allongés sous les cendres, se réveillant de leur torpeur. Les 24 lieder s’enchaînent en mini chorégraphies qui privilégient les pas de deux et les mouvements où les pieds délaissent les pointes pour mieux s’ancrer au sol, pendant que les bras cherchent le ciel en réconfort. Les douze premiers lieder forment une première partie où les solistes s’enfoncent dans un voyage de solitude où règne la douleur de l’absence, dans une esthétique à la beauté glaçante de gouffre sans fond et sans fin. La couleur s’invite comme un espoir dans la deuxième partie, avec des tableaux d’une puissance évocatoire venant saisir le spectateur d’émotion, jusqu’au final, en image inversée de l’ouverture, où les danseuses, vêtues de chemises blanches transparentes, surveillent les danseurs gisants, en spectres qui annoncent un avenir plombé. Profond et inspiré, ce voyage crépusculaire véhicule un moment d’éternité où le temps se suspend jusqu’au souffle retrouvé…

  • Winterreise
  • Pièce pour 12 danseurs
  • Chorégraphie : Angelin Preljocaj
  • Musique : Franz Schubert, Die Winterreise
  • Scénographie : Constance Guisset
  • Lumières : Éric Soyer
  • Baryton : Thomas Tatzl
  • Piano : James Vaughan
  • Vu au Corum dans le cadre du Festival Montpellier Danse 2019
  • Dates de tournée : Pavillon noir 

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