Théâtrorama

Un bureau de production artistique qui se donne pour mission de décloisonner les arts, et rendre la musique classique accessible aux plus jeunes, une metteure en scène et trois interprètes issus de disciplines différentes, les dés sont lancés pour proposer au jeune public de vivre une expérience unique. Rencontre avec l’équipe de cette toute nouvelle création.

Camille Durette, vous avez été invitée à faire la mise en scène de Alice de l’autre côté du miroir, c’est votre première expérience de théâtre jeune public…

Camille Durette : En effet, et ça résonne avec ce que je pense du théâtre, pourquoi j’en fais, et pourquoi j’aime ça. A mesure que j’ai vu se dérouler les représentations de ces deux dernières semaines, j’ai réalisé qu’un comédien est précisément celui qui sait se saisir de sa propre enfance. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle je fais du théâtre : parce que j’ai une connexion avec ma propre enfance. Enfin, travailler sur ce projet m’a donné envie de continuer à explorer le théâtre jeune public. 

Quelle est l’origine du projet ?

Célia Levasseur : En quelques mots, ce spectacle est le deuxième volet d’un dispositif qui s’appelle « Dessine-moi une musique », produit par Alto – solutions artistiques. Ily a quelques années, Louise Durette, directrice de la production, s’occupait de « Histoire de Babar », un spectacle diffusant la musique de Francis Poulenc. Elle s’est alors rendu compte qu’il était difficile pour les enfants de rester concentrés pendant près d’une heure à écouter de la musique. C’est au cours d’un voyage en Argentine qu’elle a rencontré Federico Mozzi. Il réalisait des illustrations en direct sur un spectacle de cirque. Elle a alors eu l’idée de créer un dialogue interdisciplinaire, au sens du mélange des arts. Ainsi, « Histoire de Babar » a été recréé avec Federico Mozzi et Damien Luce. Ce spectacle a touché plus de 5000 enfants à travers le monde. Devant ce premier succès, nous avons eu envie de créer un deuxième volet un peu plus étoffé, notamment par la présence d’un comédien-narrateur sur scène. 

Comment avez-vous choisi « Alice » ?

Célia Levasseur: Sur le principe de « Dessine-moi une musique », on a cherché un héros qui soit assez universel, afin qu’il puisse parler aux publics du monde entier. Le personnage de Alice de Lewis Caroll est très connu, celui « de l’autre côté du miroir » l’est un peu moins. Nous étions également contents de représenter une petite fille intrépide, courageuse, qui vit des aventures et qui a certes envie d’être une reine, mais pas une princesse. 

Federico Mozzi: C’est intéressant d’un point de vue du dessin, car c’est une histoire qui a beaucoup été illustrée. Choisir de travailler autour de la figure de Alice nous a permis de prendre une oeuvre très « classique », très « littéraire », et pouvoir la moderniser. Nous avons pu la ramener dans notre temps, et de ce fait, la réinterpréter.

Comment avez-vous travaillé le dialogue entre les différentes disciplines pendant la création ?

Michaël Faucard: C’est la première fois que je travaille dans ce cadre-là. Créer avec un dessinateur et une compositrice violoncelliste amène à faire des propositions différentes et de ce fait, très enrichissantes. 

Federico Mozzi : Au début du projet, j’étais en résidence à la Cité des Arts pour 3 mois. Nous en avons profité pour nous rencontrer, car nous ne nous connaissions pas. Pour construire le projet, nous avons d’abord travaillé sur la communication, l’échange, l’interconnexion, afin que ces éléments s’échangent, qu’ils ne soient pas séparés les uns des autres. Nous avons d’abord construit des codes communs.

Lola Malique : Quand nous nous sommes retrouvés plusieurs mois plus tard, Federico avait travaillé sur la partie dessinée, Mickaël sur le texte et son interprétation. Pour la musique, je suis partie en résidence au monastère de Saorge. On a confronté ce qu’on avait fait, pensé, imaginé pour chaque scène. Ce qui était assez agréable, c’était de composer à trois à partir d’éléments que nous avions tous travaillé séparément. 

Federico Mozzi : C’était très important que la musique soit faite par Lola. Ca nous a permis de tout construire ensemble. Dès le début, nous avions une musique qui correspondait à chaque ligne dessinée. C’est ce qui fait la richesse du dialogue narratif, du dialogue entre les disciplines. 

Comment est venue cette seconde partie du spectacle où les enfants sont invités à dessiner en musique?

Célia Levasseur: Etant donné la richesse de ces premières explorations, nous avons trouvé pertinent de proposer aux enfants de ressentir, éprouver ce dialogue entre dessin et musique. L’enfant est au cœur du spectacle. Quand nous l’invitons à monter sur scène et devenir acteur, l’idée est qu’il soit dans la lumière, qu’il se réapproprie ce qui a été fait. C’est le projet de Alto -solutions artistiques : amener de nouveaux publics vers la musique classique et la musique contemporaine. 

Michaël Faucard: Les enfants expérimentent ce que la musique peut amener à l’imaginaire, au dessin. L’idée de cette partie est de faire un premier jet, et leur donner envie de le refaire chez eux.

Au plateau comment vivez-vous cette seconde partie ? 

Lola Malique : D’un point de vue musical, il y a un contraste entre la première partie, qui est de la musique de création composée pour le spectacle, et la seconde partie, une œuvre du répertoire. Réunir ces deux aspects-là au sein d’un même spectacle permet de comprendre qu’ils racontent la même chose, car ce sont deux univers qui s’affrontent régulièrement, dans le milieu de la musique. Ensuite, en tant que musicienne, c’est vraiment une expérience très singulière, de sentir cette attention-là. Je n’ai jamais joué avec autant d’enfants autour de moi. On se demande si ça va fonctionner, s’il y aura l’attention. Et oui. Oui, parce que nous sommes ensemble. Ils dessinent, je joue. Chacun fait ce qu’il a à faire. A ce moment-là, toutes les articulations musicales prennent un sens différent. Ca donne un contexte pour jouer.

Federico Mozzi : Pour les enfants aussi, c’est souvent aussi une toute nouvelle expérience. Certains n’ont jamais assisté à un concert de musique classique ou ne sont jamais monté sur une scène. Cette nouvelle expérience pourrait les déstabiliser, mais au contraire, la musique et le dessin entrent en cohésion et leur permettent de vivre pleinement ce moment. C’est aussi intéressant qu’il y ait ma présence, en tant qu’illustrateur, sur scène. Aujourd’hui, les enfants arrêtent de dessiner dès l’âge de 12, 13 ans, et ne vont pas nécessairement poursuivre une carrière dans les arts. Ma présence leur montre que ça peut également être un métier.

Camille Durette : Je trouve que ce spectacle, avec ces deux parties complémentaire, est régénérant, également pour le public adulte, même s’il est plus discret quant à ses réactions. C’est aussi la raison pour laquelle je trouve le théâtre important dans nos sociétés : réinjecter de l’enfance, et la porter comme les interprètes la portent, de manière simple et authentique. 

  • Tout public dès 6 ans
  • Mise en scène : Camille Durette
  • Avec Mickaël Faucard, Lola Malique, Federico Mozzi
  • Crédit photo : Jean-Baptiste Chevrier
  • Crédit dessin : Federico Mozzi
  • Tournée:
  • 29 octobre 2020 à 15h et 17h30 au Théâtre Sainte Marie d’en bas à Grenoble (38)
  • 15 novembre 2020 à 11h à La Marbrerie de Montreuil (93)
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