Une mise en scène sans relief ne fait jamais décoller ce spectacle qui par ailleurs se perd dans un dialogue lourd, rarement drôle et où un seul comédien se donne vraiment. Un potentiel gâché par un manque d’originalité sur toute la ligne.
Trois mecs. Un psychorigide qui croit qu’une tenue de yoga suffit à faire de lui un parangon de « zen attitude » alors que l’idée de sortir de chez lui le fait glaglater et qu’il va pisser sans fermer les portes des WC. Son frère, animateur d’une émission de télé débile, imbu de soi-même et persuadé que toutes les nanas veulent lui arracher le caleçon. Enfin, le bon pote qui vient squatter chez le premier parce que sa moitié lui a fait comprendre diplomatiquement que plus il s’éloigne, mieux elle respire. Au final, chacun va s’avérer passablement esquinté par la vie et le soigneur devient vite le soigné et inversement.
L’auteur de cette pièce est un véritable phénomène dans sa Finlande natale et passe pour un modèle d’innovation et d’intelligence. On n’en doute pas, le bonhomme étant, outre dramaturge et metteur en scène, directeur de la scène nationale finlandaise. Et « Panik » d’être taxée de comédie moderne où sont passées à la moulinette d’un humour salvateur les crises de la condition masculine, réelles ou imaginaires. Trois hommes. Un film de Pedro Almodovar qui manque de déchirer leur amitié car une catharsis pour l’un, une merde pour l’autre. Tout cela débouche sur des interrogations où sont déballés sans vergogne les sentiments de chacun et les difficultés à les exprimer.
Des comédiens en roue libre
Le prisme de la traduction a-t-il déformé à ce point toute la quintessence de cette pièce, l’a-t-il vidé de toute sa substance ? On se prend à y croire, tant le texte sonne creux, ne révélant aucune originalité au regard à tous les spectacles traitant plus ou moins du même thème. Rien non plus dans la mise en scène ne va hisser l’ensemble vers des sommets. La fantaisie scandinave qui opère des miracles au cinéma (voir le tout récent « Turn me on » ou tous les films de Kaurismäki) a déserté les planches, laissant place à une franchouillardise outrageusement soulignée par des gallicismes bien peu fins, bien peu finlandais.
L’équipe artistique fait ce qu’elle peut. On ne pourra certes reprocher à personne de jouer faux, ce qui déjà constitue un bon point. Mais entre Eric Delcourt, le frappadingue de « Hors piste » qui ne ménage ni son talent de comédien ni son énergie et Anthony Delon qui fournit le strict minimum dans un jeu que ne compense évidemment pas une plastique avantageuse qu’il n’hésite pourtant guère à mettre en avant, demeure un fossé qui ne fait qu’accroitre le déséquilibre d’un ensemble, certes pas désagréable, mais passablement mollasson. Et à en croire les applaudissements récoltés, il semble que la « Panik » va surtout se tenir dans les chiffres de la fréquentation…
[note_box]Panik
De Mika Myllyaho
Mise en scène : Jean-Claude Idée
Avec Anthony Delon, Thomas Joussier, Éric Delcourt
Décors : Sophie Jacob et Jean-Claude Idée
Costumes : Sandrine Paccou
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