Théâtrorama

Une adaptation à la lettre d’un classique du roman noir…

« Le facteur sonne toujours deux fois », adaptation du livre de James M. Cain et du scénario d’Harry Ruskin et Niven Busch du film éponyme de 1946, est actuellement présenté au Théâtre des Mathurins. Si ce roman culte de la littérature américaine a déjà donné lieu à plusieurs versions cinématographiques, il est pour la première fois interprété sur les planches d’un théâtre français.

La pièce prend le partie, tant de reprendre minutieusement l’intrigue originale, que les codes du genre du film noir. L’atmosphère anxiogène est créée par les stores vénitiens qui, par les ombres qu’ils projettent sur les comédiens, symbolisent leur enfermement dans une spirale infernale. La station-service des « chênes jumeaux » (« twin oaks » en anglais) sert de décor quasi-unique à l’essence dramatique de l’histoire. La femme fatale, Laura Presgurvic dans le rôle de Cora, a pour unique dessein le détournement des hommes du droit chemin, et son entrée rappelle étrangement l’apparition d’un ange. L’amant quant à lui, est un dur à cuire (« hard-boiled » en anglais) rompu aux lois de la rue et condamné par avance par le sort de la vie. Sa voix narratrice guide le récit, qui ne peut être ponctué que d’une fin tragique, où seule la mort peut réconcilier les êtres. Enfin l’ambiance est sombre et poisseuse, là où le cambouis sur les mains précède le sang qui le remplacera.

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Néanmoins, bien que tous les ingrédients soient présents, c’est paradoxalement la théâtralité du roman et du film qui peine à trouver un écho sur scène. Le noir et blanc, le grain de la pellicule ou le charisme d’une Lana Turner, filmée lentement de bas en haut mettant en valeur ses courbes et son dangereux pouvoir de séduction, font défaut. La force cinégénique du roman est difficilement transposable sur scène et bien que la mise en scène tente d’insuffler un second souffle, le spectateur à l’instar du facteur qui ne sonne qu’une fois, reste parfois à la porte…

L’éternelle métaphore du retour de flamme…
Comme le titre de l’œuvre tend à le laisser supposer, James M. Cain est un adepte de la récurrence. Un an après « Le facteur sonne toujours deux fois. », Cain publia en 1935 une autre œuvre culture, « assurance sur la mort » (« double indemnity » en anglais), également adapté au cinéma par Billy Wilder, qui posa les fondations du mouvement du « film noir ». On y retrouvait déjà cet attachement au double niveau de lecture et « le facteur sonne toujours deux fois » s’inscrit dans cette lignée.

Du nom de la station-service au couperet de la justice et de la mort qui finit implacablement par s’abattre sur les protagonistes, chaque action trouve une double signification et résonance. C’est l’éternel retour de l’inspecteur Sackett, joué par Yvan Varco, de l’amant après sa fuite et de la mort quand on ne l’attend plus. « C’est comme quand on attend le facteur qui doit vous apporter une lettre avec impatience. On reste près de la porte de peur de ne pas l’entendre sonner. On oublie toujours qu’il sonne toujours deux fois… ». Si les amoureux du film noir et de l’œuvre originale resteront un peu sur leur faim, les autres pourront apprécier l’effort des auteurs d’avoir mis au goût du jour un classique inoubliable, où la frontière entre le bien et le mal fond sous le soleil californien…

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Le facteur sonne toujours deux fois
Une pièce de James M. Cain
Adaptation de Jean et Alice Curtelin
Mis en scène par Daniel Colas
avec Etienne Chicot, Olivier Sitruk, Laura Presgurvic, Yvan Varco et Xavier Lafitte.
Loic Houdré reprend le rôle de Frank Chambers du 7 avril au 3 mai 2009
Du 30 janvier au 3 mai 2009
Du mardi au samedi à 20h45.Matinée le samedi à 16h30 et le dimanche à 15h

Théâtre des Mathurins
36 rue des Mathurins, 75008 PARIS
http://www.theatremm.com/
Réservations: 01 42 65 90 00
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