Théâtrorama

Le théâtre des Lucioles continue son exploration des textes de l’auteur argentin Rafael Spregelburd, avec cette comédie science-ficton déglinguée. Mais à force d’effets, la fable futuriste s’emballe un peu trop.

Crédit photo Christian Berthelot
Crédit photo Christian Berthelot

Après La Connerie l’an dernier, Marcial Di Fonzo Bo et Elise Vigier montent La Paranoïa, une pièce issue de l’œuvre prolixe de Rafael Spregelburd, l’Heptalogie, inspirée des Sept péchés capitaux peints par Jérôme Bosch. L’intrigue se déroule 20 000 après JC. Les humains sont sous le joug des « Intelligences », des extra-terrestres aux commandes de l’univers. Un capitaine de navire annonce d’emblée la couleur : « Nous sommes un morceau de patrie qui va à la dérive ». L’heure est grave : il faut assurer la survie de l’espèce humaine et contenter les volontés toujours plus folles des ces Intelligences avides de nouveautés. Un commando de quatre hurluberlus est missionné par un étrange colonel des opérations spéciales terriennes pour leur servir la « protéine » qu’elles adorent : la fiction. Ils ont 24 heures pour échafauder un scénario qui apaisera les Intelligences en manque d’imagination…

La Paranoia 3@ Christian Berthelot
Crédit photo Christian Berthelot

Télescopage des genres
Et voilà le public embarqué dans cette comédie SF, aux allures de Star Trek, animée par quatre énergumènes, complètement à l’ouest : un astronaute à la retraite, un mathématicien spéculatif, une auteure plagiée et un robot transexuel. Dans un décor aseptisé et futuriste, le quatuor n’y va pas de main morte pour construire à la va-vite un récit déjanté, dont les élucubrations sont projetées au fur et à mesure sur un vaste écran cylindrique. On suit les péripéties de personnages exubérants : une miss Venezuela défigurée, un commissaire client des bordels, une procureure transie d’amour… Les histoires sans queue ni tête se tissent, s’imbriquent, s’emmêlent. Pas facile de tout saisir. Mais le public se laisse porter, un temps du moins, par cette frénésie dramaturgique, qui mélange théâtre et cinéma, bouscule le temps et l’espace, renvoie aux films d’horreurs, séries B ou Z, telenovas sud-américaines…

Et puis, les comédiens des Lucioles s’amusent comme des petits fous : incroyablement inspirés, ils livrent un jeu riche, tout en reliefs. Ils épuisent tous les ressorts de la scène pour servir cette fable cosmique fleuve… quitte à s’y perdre. Trop d’effets tuent l’effet. Pris par une fièvre boulimique, les sept comédiens finissent par en faire trop. Le mécanisme s’essouffle (la pièce dure 2h20) et le public se lasse de tant de subterfuges et de projections-vidéos qui noient le récit, déjà bien trop alambiqué. Dommage, car le talent des artistes est indéniable, avec une mention toute particulière pour Pierre Maillet, époustouflant (comme à son habitude) dans le rôle taillé sur-mesure du travesti.

A Noter : La Panique, du même auteur, sera mise en scène par Pierre Maillet et Marcial Di Fonzo Bo, au Théâtre La Bastille, à Paris, avec la collaboration des élèves de 3e année de l’Ecole du Théâtre des Teintureries de Lausanne et Valérie Schwarcz. Du 22 au 25 octobre.

[slider title= »INFORMATIONS & DETAILS »] La Paranoïa (site web)
De Rafael Spregelburd
Mise en scène de Marcial Di Fonzo Bo et Elise Vigier
Jusqu’au 24 octobre
Tous les jours à 20h30. Dimanche à 15h30

Théâtre de Chaillot
1 place du Trocadéro, Paris 16e
Réservations : 01 53 65 30 00
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