Théâtrorama

Une succession de tableaux de Théo Mercier

La Fille du collectionneur de Théo MercierArtiste plasticien facétieux, Théo Mercier collectionne les étiquettes pour mieux les détourner. Avec Radio Vinci Park et La Fille du collectionneur présentées au Festival « Les Inaccoutumés », il s’approprie la scène pour développer des récits uniques dans un univers presque mystique.

Dans l’ordre de succession

La Fille du collectionneur attend le spectateur à la façon d’une odalisque allongée face au mur. Comme si elle était elle-même oeuvre d’art, elle joue du regard et de ce mur qui la réifie. Modèle et propriétaire, elle mime les objets qu’un commissaire priseur énumère pince-sans-rire. Une à une, pièces historiques et objets anecdotiques sont mentionnées dans de savoureuses descriptions. Marlène Saldana donne remarquablement l’idée de la richesse, de la profusion et de la variété de cet héritage dans une grande économie de moyen. A cette première partie, la plus construite, succède différents tableaux aussi bien musicaux que picturaux qui laisse penser que pour Théo Mercier la narration doit être avant tout plastique. Bien sûr les mots participent aux récits, ceux d’une fille qui en veut à son père et cherche à s’affirmer dans l’ombre de sa collection mais ils ne sont que des indices.

Mystique de l’objet

Si la collection est absente, le décor n’est pas pour autant vide. Un tableau surnage au dessus d’un espace d’exposition tout sauf neutre. Ce qu’il représente, c’est une structure métallique qui réapparaîtra au dernier acte. Les rideaux, les fonds amovibles, la brume qui jouent avec les profondeurs de la scène ménagent des séquences d’apparition et de disparition qui sont autant de ressorts dramaturgiques. Ce sont des formes, des repères visuels qui servent de conducteurs et matérialise le phénomène de possession. François Chaignaud apparaît ainsi entre le fantôme et le génie comme une présence hypnotique suscité par son environnement. Evocation par le mime de stars du passé, cigarette et verre à la main, par le même de célébrité actuelles dans des chorégraphies endiablées il rayonne dans ce monde d’artifices où il célèbre une forme de viralité et de transmission par l’objet.

L’héritage par le vide

La structure métallique du fond de scène, annoncée par le tableau inaugural, souligné autant que caché par des draps par la suite installe un mystère. Lié apparemment à un contexte familial précis, à une histoire intime, ce sont les traits d’un dessin que l’on peut interpréter à sa guise : barreau d’une prison, anneaux de l’athlète, fil du funambule, jeu de plein air pour enfants déjà grands. C’est une sculpture trop grande pour que l’on s’en débarrasse, un cadre avec lequel il faut composer. Différents personnages vont et viennent, serviteurs et figurants, silencieux acteurs et témoins affairés. Personne n’est là pour répondre au question. Quelque chose nous dépasse et dépasse probablement la fille du collectionneur elle-même. Qu’allons-nous faire de tout cela ? Une expérience de la transmission – évidemment.

 

La Fille du collectionneur
Mise en scène : Théo Mercier
Conception : Théo Mercier et Florent Jacob
Avec : François Chaignaud, Jonathan Drillet, Harris Gkekas, Angela Laurier, Marlène Saldana
Scénographie et sculptures : Théo Mercier, Arthur Hoffner
Assistant à la mise en scène : Florent Jacob
Textes : Jonathan Drillet et Marlène Saldana
Dessins et story board : Jérémy Piningre
Musique : Laurent Durupt et les musiciens du Umlaut Big Band
Musiciens : Romain Vuillemin, Rémi Fox, Antonin Gerbal, Sébastien Beliah
Création lumière : Eric Soyer
Stagiaires costumes – scénographie : Anaïs Caulat, Juline Darde-Gervais, Alice Louradour
Construction décors : Les ateliers de Nanterre-Amandiers
Crédit photos: Martin Argyroglo

Vu au Centre dramatique national de Nanterre-Amandiers

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