Théâtrorama

Voyage théâtral… Après le succès de  » La promesse de l’aube », adapté de l’oeuvre de Romain Gary, c’est à un véritable voyage théâtral dans la vie et l’oeuvre d’Anton Tchékhov que nous invitent Bruno-Abraham Krémer et Corine Juresco.

On connaît tous Tchékhov nous disent-ils mais beaucoup d’aspects de la vie d’Anton nous échappent encore.  » J’ai terriblement envie de vivre » réunit des écrits intimes, des lettres et des extraits de pièces de Tchékhov. Réplique de Platonov alors qu’il veut se suicider, ce titre en forme de clin d’oeil donne un ancrage profond à la dramaturgie du texte.

Personnage tchékhovien…
Sur la pointe des pieds, avec tendresse, Bruno-Abraham Kremer transforme Tchékhov lui-même en personnage tchékhovien. En choisissant d’ouvrir la pièce avec le personnage de Lopakhine qui vient de s’offrir la Cerisaie, nous pénétrons de plain-pied dans la vie d’Anton. Comme en écho, Kremer nous rappelle que Tchékhov est l’homme de tous les paradoxes. Né en 1860 dans une obscure province russe, petit-fils de serf, enfant battu en quête de liberté, médecin à l’écoute de ses malades, homme de théâtre et malade lui-même, Tchékhov est ici au cœur de son théâtre. Il devient le frère de Lopakhine et de Gaev de  » La Cerisaie », celui d’Ivanov ou de Platonov avec leur mal de vivre et leur haine de la tyrannie.

Solaire et solide, fragile malgré sa corpulence, généreux et d’un charisme certain, Bruno-Abraham Kremer met ses pas en toute humilité dans ceux de cet homme qui l’habite et qu’il incarne avec une grande sensibilité. Seul en scène, avec pour tout décor un tapis roulé – comme une trace explicite de « La Cerisaie » mise en scène par Peter Brook – il passe de la confidence à l’apostrophe, d’une lettre d’amour à Olga Knipper, son dernier amour, à un compte-rendu de voyage, des problèmes d’argent à une scène de  » La mouette » ou à une conversation avec les comédiens du Théâtre d’Art de Moscou.

On prend conscience alors de l’unité entre la vie d’Anton et l’oeuvre immense de Tchékhov qui compte 4500 lettres, 635 nouvelles, 16 pièces en plus des notes, des carnets de Sibérie…Dans un décor sobrement et magnifiquement scénographié par Philippe Marioge- qui connaît bien, lui aussi, l’oeuvre de Tchékhov – la cerisaie, Yalta ou les bords de la Mer Noire apparaissent comme des paysages rêvés où la seule réalité se cristallise autour du corps de l’acteur. Peu à peu dans cette voix qui murmure, qui se souvient, nous voyons naître les personnages qui, d’une pièce à l’autre, se répondent, inspirés par les amis, les frères ou les sœurs de la vie réelle.

Dans l’intimité du théâtre du Petit Saint Martin, il est bon d’entendre Tchékhov lui-même nous parler de sa vie, une vie qui remet à chaque instant l’homme au centre de tout.
 » Crise de l’humanité » dites-vous ? Réentendre Tchékhov avec son humour féroce et  » sa terrible envie de vivre », le revisiter avec ce spectacle et cet acteur-là, pourrait bien, après tout, répondre en partie à la question de la crise du sens de notre XXI° siècle bégayant !

J’ai terriblement envie de vivre…
D’après des écrits d’Anton Tchékhov
Adaptation libre et mise en scène : Bruno-Abraham Kremer et Corine Juresco
Avec Bruno-Abraham Kremer
Scénographie : Philippe Marioge
Lumières et images vidéo : Arno Veyrat
Création sonore : Medhi Ahoudig
Crédit photo: Pascal Gély

À partir du 17 septembre 2014
Du mardi au vendredi à 21 h – Samedi : 16 h et 21 h, au Théâtre du petit St Martin

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