Théâtrorama

Ermitologie, les rencontres improbables de Clédat et Petitpierre

Ermitologie, les rencontres improbables de Clédat et PetitpierreSur le plateau de Nanterre les Amandiers, le duo Clédat et Petitpierre met la sculpture en pièce et initie avec Ermitologie une balade poétique à travers l’histoire de l’art. Une méditation originale proposée dans le cadre du programme New Settings de la Fondation d’entreprise Hermès.

Etant donné, le paysage

Dans la pénombre, on ne discerne pas encore les éléments du décor. Le spectacle joue le dévoilement progressif comme pour entretenir l’idée d’un rêve ou d’un cauchemar. Le bruit d’un orage, la lumière des éclairs concentre notre attention sur un coin de la fenêtre, parenthèse végétale et paysage miniature qui rappelle autant l’art du bonsaï qu’une compositions picturale. Le regard glisse progressivement sur la caverne en dessous, allégorie dorée, abri disproportionné, culte du kitsch. Clédat et Petitpierre multiplient les références artistiques dans ce spectacle qui tient du mystère au sens religieux du terme. Tout est culture, même l’évocation du cycle du jour et de la nuit, même les orages et les accalmies. Le dallage de marbre d’un palais italien rappelle sans cesse l’héritage avec lequel nous appréhendons le monde, tel un socle de vision.

Les tentations de l’ermite

L’ermite qui se cache dans la grotte n’est autre que l’Homme qui marche de Giacometti. Il rencontrera au fil du spectacle une étrange touffe d’herbe, la Vénus paléolithique de Willendorf et un monstre robotisé tout droit sorti de La tentation de Saint Antoine de Max Ernst. L’assemblage peut sembler criard mais il est révélateur d’un éclectisme et d’une certaine continuité de l’expérience artistique. L’histoire s’il en faut une est à chercher du côté de Flaubert et de la Tentation de Saint-Antoine toujours. Les plasticiens-metteurs en scène se sont attachés à recréer une vision, un entrechoquement d’images qui donne à méditer sur le monde qui nous entoure et la façon dont nous réinventons sans cesse nous-mêmes la réalité par nos images intérieures, références partagées et représentations collectives

Marche et démarches

D’aucun diront que Clédat et Petitpierre se contentent de faire marcher des sculptures ; ils imaginent pour chaque œuvre une façon de se déplacer. L’homme qui marche doit-il glisser ? La Vénus rouler ? Ce n’est pas une simple affaire de costume mais d’incarnation ; qu’est-ce qui rend l’interprétation d’une œuvre d’art crédible ? Il faut observer longuement les œuvres, partir de leur aspect physique pour leur donner une âme et une démarche. Ces deux créateurs qui ont déjà proposé plusieurs parades de l’Art Moderne se livrent à un parcours sensible. Sur le modèle des processions, ils conjuguent signes tangibles et aspiration l’invisible ; c’est une démarche esthétique et spirituelle qui n’est pas sans humour. Il s’agit d’une profession de foi dans l’art mais aussi de la manifestation d’une philosophie humaniste.

 

Ermitologie

Avec le soutien de la Fondation d’entreprise Hermès dans le cadre de son programme «New Settings».

Conception, mise en scène et sculptures : Yvan Clédat & Coco Petitpierre
Avec Erwan Ha Kyoon Larcher, Coco Petitpierre, Sylvain Riéjou
Son Stéphane Vecchione
Lumière : Yan Godat
Assisté de : Sébastien Marc
Crédit photos : Yvan Clédat

Vu au centre dramatique national Nanterre Amandiers

Vous pourriez aimer çà

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.



Pin It on Pinterest