Z’ombres de Isabelle Pirot
Z’ombres – Au bout de quelques décennies de vie et autant de souvenirs, les ombres accumulées ont de quoi peupler l’obscurité d’un théâtre. Joies et peines, ardeur ou douleur; visages des êtres aimés et de ceux que l’on aurait voulu éviter. Entre les rideaux et derrière les pendillons; sous les fauteuils même de ceux qui sont venus pour les voir, les Z’ombres du passé se font ombres du théâtre. Elles nous enveloppent, le temps du spectacle.
La vieillesse a du bon et elle a certainement pour premier mérite de nous autoriser de douces rêveries autour de ses splendides contradictions. Gravité et Jubilation guettent le cocasse à leur balcon. Gravité tombe à l’eau, qui reste ? Quand la lumière se fait sur le plateau du théâtre, deux comédiennes, autant de générations, sont assises côte à côte. L’une a 68 ans et pense en avoir 18; l’autre a 18 ans et sait qu’elle en fera 65. La première sera la tranquillité apaisante au sein d’une chair qui a vécu. La seconde, une délicieuse verdeur… et des plus contagieuses.
Isabelle Pirot, Aurore et Marie Frémont nous livrent dans ce spectacle le joyeux entrelacs que peut être la vie quand la jeunesse persiste à l’intérieur d’un corps vieillissant. Les pensées intérieures virevoltent et se succèdent au son d’un monologue à deux voix. Les comédiennes se partage le fil, se l’échange, le piquent et se le rendent.
Quand face à nous elle commence son récit, elle a 18 ans et 68 à la fois. Elle s’exclame avec la vigueur d’une adolescente, le ton ferme, les mots osés; elle soupire avec la sérénité d’une âme vieillissante, qui sait ce qu’a été le passé. Les voix s’entremêlent pour nous raconter les souvenirs de ce quelqu’un qui n’a pas d’âge. De la visite à l’hôpital d’une amie mourante aux dernières insomnies où les listes de courses viennent masquer l’angoisse, nous suivons les tribulations de cette tête qui ne cesse de réfléchir le monde. Se succèdent et s’emmêlent l’analyse des ressentis, les questions existentielles; les doutes et les certitudes aussi.
Z’ombres – Les doutes de l’âge
Plutôt mourir vivante qu’à demi-morte, clame-t-elle dans les couloirs d’un hôpital stérile. Et c’est bien ce vivant plutôt que le demi-mort que les deux comédiennes essaient de faire advenir sur la scène du théâtre. Même si le spectacle doit gagner en agilité et en souplesse, il nous offre une jolie variation qui prend parfois les allures d’une valse. Les deux comédiennes ne se lâchent jamais la main. Elles se la prennent souvent. Les pensées brassées n’offrent certes rien d’inédit sur le sujet de l’âge mûr mais elles ont cet avantage de friser parfois le jubilatoire. Marie Frémont, succulente jeune comédienne, se montre experte en la matière : avec elle, la danse décolle. Merveilleuse Vie à l’intérieur du Vieux Théâtre.
Z’ombres
De Isabelle Pirot
Avec Isabelle Pirot et Marie Frémont
Mise en scène: Aurore Frémont
Scénographie: Claude Lenoir
Lumière: Geneviève Soubirou
Crédit photo : Julie Rozenn
Jusqu’au 26 juillet au Théâtre du Balcon, à 17h25 – relâche les 13 et 20 juillet
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