Théâtrorama

Les Carnets d’un acteur – mise en scène d’Alain Timar

Les Carnets d’un acteur -  mise en scène d’Alain TimarL’avant-scène est nue, au lointain un rideau rouge, ou plus exactement un pongé de soie. C’est un rouge lumineux, brillant, sa transparence est belle. Derrière ce rideau, un homme balaye inlassablement, habitué aux mouvements de répétition.

C’est Fédor, surnommé avec ironie, Will, comme pour mieux lui rappeler William Shakespeare qu’il vénère. Depuis longtemps il est l’homme à tout faire du théâtre. C’est ainsi qu’il gagne sa vie. C’est affligeant et il le sait très bien. Son rêve à lui, c’est jouer Shakespeare sans concession ! À quoi pense-t-il ? cherche-t-il quelqu’un ou quelque chose ? Rêve-t-il ? Est-ce le public qu’il guette ? Son corps est tendu, prêt à s’élancer dans un habit de roi ou de prince, il ne dit rien, observe simplement. Soudain il passe devant le rideau, la parole vient et ne le lâchera plus durant tout le spectacle. Ainsi démarre Les Carnets d’un acteur.

Le spectacle fait place à l’audace de l’écriture et au jeu du comédien

Les Carnets d’un acteur -  mise en scène d’Alain TimarL’écriture d’Alain Timar est puissante, son travail d’adaptation autour des œuvres shakespeariennes, reste marqué par un fil conducteur : faire jouer Fédor. Fédor est un être blessé, emporté dans sa tourmente de comédien raté. Il ne comprend pas ce qu’il fait là, pourquoi ne lui a-t-on jamais confié de grands rôles, lui qui les adore. Qu’a t’il fait pour ne pas faire partie de la grande famille des tragédiens ? Le saura-t-on vraiment ? Il est en colère, Shakespeare est son Maître, il le connaît sur le bout des doigts. Tant pis, il va jouer pour lui, pour lui seul. Avant que le public ne prenne place dans la salle, il s’habille d’un manteau noir, et vit comme un rêve, sa folie d’homme. Apparaît Richard III, Hamlet et tous les autres, vêtus de couleurs, de lumière, d’imagination effroyable, de miroirs symboliques, et de mannequins qui envahissent le plateau.

Une mise en scène jubilatoire

Fluide (le rideau rouge déplié au sol sur lequel marche pieds-nus le comédien est magnifique), juste (la vidéo de Quentin Bonami est génialement bien trouvée), et enluminée (la création lumière de Richard Rozenbaum donne la puissance nécessaire aux différentes scènes), elle permet au spectateur de reprendre son souffle, envahit par le monologue de Charles Gonzalès, impressionnant de vérité. La performance narrative est exceptionnelle.

Certains trouveront une difficulté autour de l’exubérance du texte. Certes, ce n’est pas un spectacle facile, mais aller au théâtre c’est aussi écouter, voir, ressentir les émotions d’un auteur, d’un metteur en scène et des comédiens. C’est aussi la force qu’impose cette pièce qui ne laisse personne indifférent.

Les Carnets d’un acteur
D’après Dostoïevski
Les carnets du sous-sol et Le rêve d’un homme ridicule
Compagnie Alain Timar
Adaptation, mise en scène, scénographie : Alain Timar
Avec Charles Gonzalès
Crédit photo : Céline Zug

Avignon OFF 2018

Jusqu’au 29 juillet à 17h au Théâtre des Halles

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