Littéral – Les Hivernales d’Avignon
Avec Littéral, Daniel Larrieu fête littéralement avec son dernier spectacle ses soixante balais sur scène. Une proposition malicieuse où se mêle l’effervescence des années 80 et l’énergie de toujours jeunes danseurs. Un joyeux anniversaire pour le festival des Hivernales.
Corps de balais
Au centre de la scène, un balai défie la gravité et le mouvement des danseurs. On le frôle, on passe à côté sans jamais le faire tomber, il a quelque chose d’inflexible. L’évocation peut-être d’une ligne de conduite. Les cinquante neuf autres balais en suspens dans les airs, alignés en coulisses ou tombés en bords de scènes, des fulgurances, des équilibres, une tension qui caractérise un spectacle. Daniel Larrieu est le premier à entrer en mouvement dans une combinaison miroitante et un brin futuriste qui donne de l’ampleur à ses mouvement. Avec ce premier solo, il donne, avant de s’effacer, une direction aux cinq autres danseurs tous vêtus de rose. La barbe aidant sans doute, le danseur s’affirme chef de file et transmets un vocabulaire mis au point depuis des années. Les danseurs se passant la combinaison prennent en effet sa suite dans une gradation, duo, trio, quartet et quintet qui joue des possibilités du groupe.
Gymnastique savante
La distinction entre les combinaisons miroitantes et les tenues rose n’est pas gratuite mais initie un jeu de regard. Il est entendu, changement de costume à vue, que ceux qui revêtent la combinaison attirent davantage l’attention, mais pour autant les autres danseurs ne restent pas inoccupés. La pièce travaille avec la notion de choeur et d’individualité dans une logique qui relève de la construction. C’est un univers ludique qui stimule le spectateur et nous entraîne dans cette gymnastique savante. La danse de Daniel Larrieu se caractérise par la précision des enchaînements et une apparente simplicité de geste qui allie maîtrise et décontraction. Les interprètes, instaure ainsi, notamment en regardant le public mais également en affichant leurs joies d’être là une proximité étonnante et une bonne humeur rafraîchissante.
Effet de génération
Au travers des musiques qui se succèdent, Daniel Larrieu encourage l’éclectisme. Depuis le chant lyrique, la dimension diva sans doute, à la musique électro, la compilation a quelque chose d’assez jubilatoire et permet aux danseurs de trouver une certaine liberté. Si l’humour est permis, par une accolade, par une image, il n’y a aucun relâchement dans l’exécution. Le travail de symétrie, la pureté des mouvements répétés à l’unisson évoque la rigueur du ballet, chorégraphique cette fois. L’argument s’il en faut un, pourrait être celle d’un maître à ses disciples, apprentis sorciers à la manière d’un certain Mickey Mouse … Dans cette manière qu’à le chorégraphe d’engager un dialogue, on sent plus que la simple célébration d’une carrière, le plaisir d’une perpétuation. La perpétuation d’une danse qui, développée dans les années 80, continue de bouger.
Littéral
Chorégraphie : Daniel Larrieu
Interprètes : Marie Barbottin, Léa Lansade, Marion Peuta, Jérôme Andrieu, Yan Giraldou, Daniel Larrieu
Musique : arrangement solo Jérôme Tuncer 10 mn, création de Quentin Sirjacq, 30mn & Karoline Rose, 20mn.
Création lumière : Marie-Christine Soma
Scénographie : Mathieu Lorry-Dupuy
Les balais réalisés en paille de sorgho ont été fabriqués à l’ancienne par Didier Dussere à Saint Chaptes en France
Crédit photos: Benjamin Favrat
Vu dans le cadre des Hivernales d’Avignon
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