Théâtrorama

Un régal…

Du paradis à l’enfer… Quand vous passez devant une toile de Jérôme Bosch, vous êtes happé par une vision d’ensemble apaisante. Harmonie des couleurs qui trompe l’œil et le happe comme un piège pour le forcer à se rapprocher et à tomber dans un univers fantasmagorique. Le paradis s’effrite comme un collier en plaqué or pour laisser la place à un chaos surréaliste grouillant de personnages étranges et inquiétants qui poussent au vertige. Du vertige de la peinture à celui de la danse, il n’y a qu’un pas qu’a franchi Blanca Li en s’inspirant du tryptique du peintre, « Le jardin des Délices », pour nous offrir une délicieuse confusion des sens.

JARDIN DES DELICES 1

Mettre en mouvement la peinture… Voilà le prodige scénographique qu’a réalisé Eve Ramboz par un film d’animation du « Jardin des Délices ». Le bestiaire prend vie en toile de fond et semble sortir de son cadre quand les danseurs prennent le relais. Le mouvement puise dans un mimétisme animalier qui mène les danseurs à s’allier pour former des bêtes fantasmagoriques qui passent comme un rêve et traversent la scène. Un jardin d’Eden à la Bosch qui conduit à un cabaret qui concentre une humanité bloquée dans le purgatoire du quotidien. Deux types de bestiaire qui dévoilent les facettes de personnages tous plus excentriques les uns que les autres, livrés en pâture à leur passion, leurs vices cachés, leurs désirs avoués et leur angoisse existentielle. Pas question de chercher une logique dans l’enchaînement des tableaux. L’exubérance est de mise et cohabite avec une folie contagieuse. Correspondance parfaite entre la peinture et les chorégraphies, le spectateur plonge dans ces jardins avec délice.

Succombez à la tentation…
JARDIN DES DELICESUn joyeux jardin… La vision apocalyptique de l’univers de Bosch reste en sourdine face à la fantaisie joviale des chorégraphies de Blanca Li. L’humanité, malgré ses petits débordements et ses grandes faiblesses (un concentré des sept pêchés capitaux qui donne envie se convertir à la religion de la danse) est avant tout une explosion d’énergie et un hymne à la vie. Le cabaret offre une effervescence qui flirte franchement avec l’exagération pour tourner parfois au grotesque (pour le plus grand plaisir du public). Blanca Li en chanteuse de revue désespérée, remake de femmes au bord de la crise de nerf, entraîne le reste de sa troupe sur les rails de la folie ambiante. La comédie se mêle à la danse. Les personnages enchaînent des scènes comme s’ils tournaient un film. Au premier plan : la tyrannie du téléphone portable, les envies de femme enceinte, l’étalage des corps en quête de séduction massive, scène d’arrogance quotidienne et d’exaltation collective…

L’enfer c’est les autres, le paradis c’est leur entente mutuelle. L’équilibre est fragile entre toutes ces relations humaines, les scènes se décomposent aussi vite qu’elles se sont montées. Un éphémère artistique qui marque par ses ingénieuses trouvailles. Dans ce méli-mélo organisé, tout est millimétré. Le détail remporte les rires de la salle (un passage éclair de Nicolas et Carla sur scène trouve sa place au milieu de ces créatures de Bosch), le défilé de mode des arts de la table devrait inspiré plus d’un styliste pour une prochaine collection (il est temps que la ménagère reprenne sa taille mannequin), les fraises qui descendent du ciel comme un miracle demandé par la femme enceinte (oohhhh des fraises) donnent faim… Le rythme haletant des scènes de cabaret est contrebalancé par le retour au bestiaire de Bosch où le travail au sol, qui rapproche de la condition animale, ralentit le mouvement. La modernité du cabaret s’accorde comme les mêmes morceaux d’une partition avec l’univers fantasmagorique de Bosch. Des obsessions du Moyen-âge aux vicissitudes de notre siècle, l’évolution a passé un coup de pinceaux sur nos mœurs, mais le fond reste le même.

[slider title= »INFORMATIONS & DETAILS »]
Le Jardin des Délices
Mise en scène et chorégraphie : Blanca Li
Film « Jardin des délices » : Eve Ramboz, assistée de Claudio Cavallari
Vidéo : Charles Carcopino, assisté de Simon Frezel
Musique : Tao Gutiérrez
Scénographie : Pierre Attrait, assisté d’Elisabeth Dallier
Lumière : Jacques Châtelet
Costumes : Laurent Mercier, Françoise Yapo
Perruques : Jean-Jacques Puchu
Sculptures corporelles : Tilmann Grawe
Assistante chorégraphe : Déborah Torres
Conseiller vocal : Jeff Cohen
Maître de ballet : Antonio Alvarado
Danseurs : Blanca Li, Géraldine Fournier, Glyslein Lefever, Margalida Riera, Amin Benassa, Jean-Gérald Dorseuil, Stéphane Lavallée, Rafa Linares, Yohann Tete (remplaçants : Sébastien Perraud, Aurélie Cantin)
Pianiste : Jeff Cohen
A voir jusqu’au 30 juin au théâtre des Champs-élysées à 20h, dimanche 28 à 17h
http://www.theatrechampselysees.fr/
Réservations: 01 49 52 50 50
3 juillet : Synodales de Sens
11 juillet : Festival des 2 Cités à Carcassonne
13 juillet : Estivales de Perpignan
23 septembre : festival Cadences darcachon…
Pour tout savoir sur les dates de tournée
[/slider]

Vous pourriez aimer çà

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.



Pin It on Pinterest