La priorité pour cette rentrée théâtrale n’est pas de savoir si la brochette de pièces à l’affiche sera bonne mais d’espérer que la saison ne sera pas porcine. La fermeture des écoles est dans tous les débats sur la grippe A. Qu’en est-il des lieux publics ? Un pic de cas et le niveau 6 est déclenché, entraînant la restriction provisoire des rassemblements publics pour éviter la diffusion d’un virus anticulturel. A moins de se rendre dans les salles, un masque sur le visage, comédiens compris, ce qui leur rappellera la grande époque du théâtre antique. Les périodes d’épidémie hivernale étaient déjà pénibles pour les représentations hoquetant entre quintes de toux contagieuses dans l’assemblée et reniflements dans les silences. Avec la grippe A, chaque raclement de gorge sera tout de suite perçu comme hostile. Le spectacle se fera dans la salle pour guetter son voisin du coin de l’œil et éviter consciencieusement tout partage commun d’un accoudoir suspect. Les compagnies auront intérêt à doubler tous leurs rôles pour éviter l’hécatombe. Les comédiens à risque (au-dessus de 50 ans, obèses, asthmatiques et cardiaques) seront écartés et la présentation du carnet médical attestant d’une vaccination salvatrice exigée. Les pièces à plus de dix comédiens seront priées de revoir leur distribution à la baisse (12 hommes en colère pourra devenir 6 hommes en colère) pour limiter la propagation du virus. Pour pallier le trou économique béant laissé par la fermeture à durée indéterminée des salles, une solution de théâtre à domicile en petit comité pourra être proposée. Et les pièces pourront être filmées pour être diffusées sur Internet, en téléchargement payant va sans dire, pour ne pas avoir Hadopi sur le dos en plus du virus.