Théâtrorama

Zoom sur Aurélien Kairo

Aurélien Kairo, petits pas après petits pasAvignon réserve chaque année son lot de surprises dont elle seule a le secret. Rencontré par hasard dans les ruelles baignées de soleil de la cité des Papes, le danseur et chorégraphe Aurélien Kairo a, comme les centaines de compagnies présentes dans le Off, partagé ses trois semaines de festival entre les représentations sur scène et les parades pour rameuter public et programmateurs. L’occasion de découvrir son spectacle, Un petit Pas de deux sur ses pas, qu’il présentait tous les jours au théâtre des Lucioles avec sa partenaire, Karla Pollux, et de discuter avec ce danseur multi-casquettes, aujourd’hui à la tête de la compagnie De Fakto.

Pourriez-vous revenir sur votre parcours et votre formation ?
Aurélien Kairo : Adolescent, je découvre la culture hip-hop grâce au rap engagé du groupe américain Public Enemy. Je me passionne pour l’idéologie charismatique d’Africa Bambataa, originaire du Bronx, qui fonde la Zulu Nation en transmettant des valeurs fortes du vivre ensemble. À travers cette culture artistique, je m’essaye activement au djing et au rap, mais je préfère finalement les mouvements au sol de la break dance, de la hype et du poppin. L’expression de la danse est alors une révélation pour moi et fait naître une véritable vocation. J’ai un parcours de danseur hip-hop autodidacte et, dans ce cas de figure, les rencontres déterminent presque tout. J’ai eu la chance de travailler très vite avec de très grosses compagnies comme Accrorap et Käfig en hip-hop, et chez Maurice Béjart et Marie-Claude Pietragalla côté classiques. Les nombreuses tournées, ces rencontres et cette ouverture sur le monde contribuent à mes compétences artistiques. Enfin, en 2002, j’ai fondé la compagnie De Fakto pour pouvoir créer et diriger mes propres spectacles.

Comment avez-vous rencontré votre partenaire, Karla Pollux, et qu’est-ce qui vous a amené à créer Un petit pas de deux sur ses pas ?
Aurélien Kairo : Karla et moi, c’est d’abord une histoire d’amour, ce qui apporte une plus-value au spectacle. Dans un duo, une parfaite complicité sur scène est importante et c’est quelque chose d’acquis entre nous puisque nous nous connaissons par cœur. Dans le travail au quotidien c’est moins simple que cela : une vie de couple dans le travail, ce n’est pas que de la romance ! (rires) Karla évolue artistiquement aussi avec d’autres projets et avec d’autres metteurs en scène comme par exemple Laura Scozzi. Quant à la genèse d’Un petit pas de deux sur ses pas, j’apprécie la chanson française et j’aime particulièrement raconter une histoire dansée grâce à ce formidable outil musical. C’est mon deuxième spectacle sur ce principe.

Mon premier fut un solo sur des chansons de Jacques Brel qui a voyagé dans douze pays pour plus de deux cent cinquante représentations, et qui a obtenu deux prix. Cette fois, le choix s’est porté sur Bourvil, simplement parce que je suis un grand fan de la chanson du Petit Bal perdu, qui me touche profondément. Le directeur du Centre national des arts de la rue de Villeurbanne, Patrice Papelard, m’a un jour passé une commande de dix minutes dans la rue, sur une place avec une jolie fontaine en arrière-plan. Nous l’avons jouée au festival « Les Invites » de Villeurbanne, avec un succès immense auprès du public. Je me suis alors appliqué à écrire un incroyable scénario en direction du théâtre.

D’où vient ce panachage de styles qui structure votre duo ?
Aurélien Kairo : Le défi était de reproduire à notre époque un duo à la “Ginger et Fred“ et le tout en hip-hop, afin de construire un spectacle intergénérationnel et accessible, où tout le monde peut y retrouver quelques bases de danse. Eh bien ce ne fut pas simple car nous ignorions par exemple tout du tango ! Nous avons dû faire appel à un chorégraphe afin de nous aider dans cette tâche. Sans lui, nous n’aurions pas su créer la scène sur la chanson Un clair de lune à Maubeuge. Chaque scène de danse revisite une danse de salon mélangée à notre sauce hip-hop et parfois certains remix musicaux participent à cet événement et contribue au panache de la proposition.

En fait, votre duo serait plutôt un trio… Que devez-vous à Bourvil, dont la voix et les chansons vous accompagnent ?
Aurélien Kairo, petits pas après petits pasAurélien Kairo : Bourvil est omniprésent. À l’aide d’un savant découpage de toutes ses voix trouvées dans ses films ou ses interviews sur l’INA, j’ai jonglé avec ses mots et phases, et via un montage sonore, j’ai recréé un dialogue réaliste qui m’a permis cette mise en scène étonnante entre lui et nous. Il faut l’entendre pour le croire. Après chaque représentation, on me demande souvent comment j’ai construit la bande son et comment j’ai réalisé cette performance sonore. Bourvil était un formidable clown à l’écran mais, dans ses chansons, c’est plutôt l’homme tendre et très humain qui s’en dégage. J’ai presque envie de dire qu’il était simple mais simple dans le bon sens. Il était généreux et accessible proche de monsieur Tout-le-monde. Aujourd’hui, les comiques ont changé, tout comme notre époque. Tout est compliqué et beaucoup plus sophistiqué et c’est parfois bien dommage. Le stand up et notre époque ont un peu anéanti cette poésie comique qu’est le clown blanc rêveur… En tous cas, c’est sans doute cela qui me touche chez Bourvil et qui me manque chez les comiques médiatisés d’aujourd’hui. Heureusement que nous avons le spectacle vivant. Courez voir les clowns et autres acteurs du genre ! Dans ces salles obscures, vous y trouverez des cœurs immenses.

Un petit pas de deux sur ses pas
D’Aurélien Kairo
Avec Aurélien Kairo, Karla Pollux
Actualités et dates de tournée sur le site de la Cie DE FAKTO 
Crédit Photo : D.R.

 

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